L'envers de la médaille.

Tout n'est pas doré quand même. Après les fastes du Carnaval et les eaux bleues, ce soir, j'ai envie de vous parler de ce qui n'est pas facile quand on arrive ici.

Tout d'abord le rythme : on ne se rend pas compte de ce que veulent dire les mots "tôt, tard, grasse matinée" tant qu'on n'a pas vécu ici. Les gens sont fous dans ce pays : voilà, en gros, le déroulement de nos journées :

• 4h30 : Donald et Riri se lèvent : un pour le boulot à 6h30, l'autre pour le lycée à 7h00. Comme il n'y a qu'une seule route qui relie MontDore à Nouméa, il faut anticiper les bouchons, donc, départ max à 5h20. Riri part avec son père, les transports en commun ici (surtout Car Sud) sont plus ou moins aléatoires et le bus qui pourrait faire en sorte qu'il arrive à l'heure au lycée passe en bas de chez nous à 4h30 bien sûr. Donc, c'est papa qui s'y colle ...
• 5h20 : Fifi se lève, pour partir prendre le ramassage scolaire, Transco, à 6h30 .
• 6h30 : Loulou émerge, pour être dans la cour de l'école à 7h45 : heureusement, l'école est tout près, 3 minutes en voiture.
• à 11h30 : sonnerie à l'école primaire : c'est parti pour le rush du midi, les cours reprennent à 12h30. Une heure pour manger, c'est pas lourd, le repas a intérêt à être prêt. Retour à l'école à 12h30 pour sortir à 15h15.
• 17h00 : retour de Fifi, qui sort du collège à 16h30. Heureusement, le collège n'est qu'à 15 minutes de route.
• 17h00 : retour de Donald, quand tout se passe bien. Les horaires de boulot : 6h30/11h30 - 12h30/15h30 ou 16h suivant les chantiers.
• 18h30 : retour de Riri, quand son père ne le ramène pas, comme ce soir par exemple.

Du coup, vu l'amplitude horaire des journées, eh bien, le soir, çà ne traîne pas : devoirs, douches, repas et tout le monde couché avec grand plaisir à 19h30/20h00. Et je vous promets que les 18 et 16 ans des grands ne les empêchent pas du tout d'aller se coucher, et sans rouspéter un seul instant.

Et le week-end : et bien, si on dort jusqu'à 7h00, c'est du bonheur!

C'est vrai que le soleil se lève tôt, vers 5h30 et se couche tôt, vers 18h30. En fait, à 18h30, il fait nuit noire, donc aller se coucher n'est pas gênant ... sauf quand on est un zor et que là, c'est bizarre quand même.

Mais au bout de 2 mois, c'est bon, le rythme commence à rentrer.

Ensuite, ben, au choix : le coût de la vie, horriblement cher, même en mangeant le plus local possible. Les fruits, les légumes, le poisson sont hors de prix, il faut savoir sauter sur le moindre rabais, solde, opération spéciale : un exemple : en ce moment, les fruits les moins chers sont les pommes de Nouvelle Zélande : 420 XPF/kilo, soit, en gros 4 € ...jusqu'à présent, le moins cher du moins cher était les tomates à 120XPF/kilo et le chou vert quasiment au même prix. Il faut aimer les tomates et le choux ...

Ce qui n'est pas cher du tout par contre : l'alimentation de base des gens d'ici : beaucoup n'ont pas les moyens donc : 

• le riz : midi et soir, à 210XPF le sachet de 1 kilo, on en consomme des tonnes ...
• le poulet ; la viande la moins chère ici, suivie bizarrement du veau. Par contre, le porc est juste hors de prix.
• les soupes chinoises : 0,30 XPF le sachet : souvent, les gens mangent une soupe le soir.

La nourriture exceptionnelle : poisson cru, salade tahitienne, cerf ...est réservée aux moments de fête, avec les amis ou la famille.

Les difficultés d'approvisionnement : nous sommes sur une île : une semaine il y a des yahourts, la semaine d'après, il n'y a plus rien. Quand il y avait la grève des rouleurs, les rayons étaient vides : plus de riz, plus de pâtes, plus de fromages, plus de farine, plus de sucre, plus d'oeufs, plus de pain ...et là, on touche du doigt la notion de confort : en France, qui peut dire qu'il y a une rupture totale des aliments de base? Qui s'est retrouvé complètement pris au dépourvu en se disant "merde, comment je fais là"?

Du coup, maintenant, j'ai bien compris : le riz, la farine, les oeufs ... c'est par 5/6 boites que j'achète et quand il n'y en a plus que 3 dans le placard, je rachète. Parce que le bateau qui livre ... il peut avoir jusqu'à 2 mois de retard. Quand je veux un truc bien précis, genre la maïzena, il faut en acheter dès que les rayons sont pleins. Et tout le monde fait pareil pour tout. Ouais, un autre mode de consommation ou stock rime avec sécurité et l'anticipation est plus que nécessaire.

Un autre point pas cool du tout : l'insécurité routière : le maître mot ici est "distance de sécurité" : plus la voiture de devant est loin et mieux c'est : stop grillés, feux rouges grillés, routes coupées, doublement par la droite ... tout y passe. De nombreux automobilistes conduisent sans permis, les marquages au sol, les panneaux, le sens de circulation sont parfois très vieux, effacés, inexistants, incompréhensibles .... Et je ne parle que de la circulation de jour. Les week-end sont meurtriers ici : l'alcool et la drogue sont de vrais fléaux, qui donnent, hélas, à la Nouvelle Calédonie le triste record du plus d'accidents mortels tous pays confondus. A de multiples reprises, j'ai été mise en garde " prends pas ta voiture la nuit, fais super gaffe, faut pas aller en brousse le we et rouler le soir ou la nuit". Oui, en voyant la conduite à jeun, je comprends.

Les difficultés administratives, autant de la part de la France que de la Calédonie : pas de sécurité sociale si tu ne travailles pas au moins un mois : couverture sociale inexistante donc le premier mois de boulot et qui ne dure que le mois d'après. C'est simple : tu bosses un mois, tu es couvert ... le mois suivant. Tu arrêtes de bosser : tu n'es plus couvert! Et la France refuse d'attester que nous avons cotisé en France depuis des années et la règle "un an de cotisations, un an de couverture" n'est plus valable ici. En fait, la conseillère de la CAFAT m'a confirmé que nous pouvions faire suivre nos droits ici et que nous serions couverts, sans délai de carence et que nous serions remboursés. Sauf que la France dit "Non, vous comprenez bien Madame que la Calédonie n'est pas reliée à la France"...ah oui, alors pourquoi est ce que le drapeau français flotte sur chaque Mairie et chaque école du Caillou? Crétin ...

Bilan : 3 enfants, des certificats médicaux obligatoires pour les rentrées scolaires, Fifi et Loulou non couverts par l'hépatite B, obligatoire ici (mon médecin en France m'avait dit : non, non, non, rien à faire de plus au niveau vaccinal, c'est tout bon ..Crétin aussi ), donc vaccins à acheter, re-médecin ...et tout çà, avant que Donald et moi commencions le boulot : résultat : nous ne serons donc pas remboursés de rien du tout ... GRRRRR!

Et en vrac : les chiens,  3 fois plus nombreux que les habitants, qui errent, aboient le jour, la nuit, surtout la nuit, qui viennent polluer notre jardin (non clôturé pour l'instant), qui font peur à Loulou (le pauvre, il est très phobique des chiens, mais je vous jure que ses grands frères et moi ne sommes parfois pas fiers).

La musique : le grand plaisir c'est d'écouter la musique à fond, à n'importe quelle heure du jour et de la nuit ...ben c'est sympa, les voisins en profitent aussi! Quoique, notre quartier est relativement calme, seulement 2 soirées disco de folie en 2 mois.

Parfois le sentiment, confirmé par les locaux, que la Calédonie ne veut pas de nous, les expat' de tout bord et que finalement, plus les démarches liées à l'intégration sont dures, plus les gens vont abandonner et retourner chez eux.

Nous avons eu la chance énorme de connaître du monde sur place (elle, ils se reconnaîtront), qui nous a aidé, soutenu, qui a préparé notre arrivée. Nous ne sommes pas passés par une agence de loc pour la maison, heureusement, ici la règle est de demander jusqu'à 3 mois de caution pour une location.

Oui, petit coup de ras le bol devant les difficultés qui s'accumulent, devant les économies qui partent en fumée, devant l'éloignement de nos proches ...il faut avoir les reins et le cerveau solide pour s'expatrier, c'est une expérience très riche mais très difficile aussi.

Heureusement nos amis, nos familles, nos proches restent là, présents. Merci

Allez, tata, je vais aller admirer le coucher de soleil. Demain est un autre jour, çà ira mieux!